Le biais de confirmation est l’un des plus connus des sciences cognitives et de la psychologie sociale. C’est un biais important qui affecte nos croyances, nos décisions, nos opinions.
Il intervient autant dans la vie de simples particuliers que nous sommes que dans la vie professionnelle des scientifiques, juristes, médecins, tous les experts qui ont à rendre le résultat de leur expertise et d’analyser des hypothèses.
Dans la vie de tous les jours, lorsque nous avons à faire un choix, lorsque nous avons une décision à prendre, lorsque nous émettons une hypothèse, ce biais nous entraîne à rechercher ou à interpréter l’information trouvée en mémoire ou ailleurs qui va permettre de confirmer ce que l’on pense déjà.
Peter Wason est un des premiers psychologues à explorer ce biais. En 1960, il présente à des sujets trois chiffres (2 – 4- 6), en leur demandant de trouver la règle pour former le triplet. La vraie règle étant « n’importe quelle suite croissante », les sujets ont eu beaucoup de difficulté à la trouver parce qu’ils cherchaient uniquement des suites qui confirmaient la règle à laquelle ils pensaient au lieu de donner des suites qu’ils supposaient non conformes. Ils essayaient de confirmer la règle au lieu de l’infirmer pour la trouver.
Notre mémoire, notre pensée est sélective. Quand nous avons à affirmer, nous formons notre jugement sur des informations qui vont confirmer nos croyances en ignorant ou sous évaluant la pertinence de ce qui contredit nos convictions.
Supposons que nous venons d’acheter quelque chose en solde ou bénéficiant d’une promotion. Pour nous confirmer que nous avons fait « une affaire », nous allons sélectionner des magasins qui offrent la même chose mais qui sont réputés plus cher que le magasin où on a trouvé notre si belle occasion ou alors, nous allons tout simplement éviter d’être confrontés à ce même objet dans un autre magasin.
Cette tendance que nous avons est particulièrement pernicieuse quand nos croyances s’appuient sur des préjugés. Or, nos préjugés forment aussi nos croyances. Ainsi, le biais de confirmation est sans doute le plus délicat des biais cognitifs, car il nous permet d’asseoir nos opinions sur des mensonges.
Cette expérience relatée sur le site du CRS montre comment on peut être influencé par un préjugé.
L’équipe dirigée par Tim Levine, de l’Université d’État du Michigan, aux États-Unis, a fait visionner un épisode de la série « Lie To Me » (dans lesquels les experts utilisent dans leurs investigations la présence de micro-expressions faciales pour détecter les menteurs) à un premier groupe avant de leur administrer un questionnaire. Un autre groupe sert de groupe contrôle et ne visionne rien avant de remplir le questionnaire. Le questionnaire porte sur le jugement de 12 personnes dont six mentent et six disent la vérité.
Ceux qui ont regardé la série se sont montrés beaucoup plus suspicieux sur l’honnêteté des 12 personnes. Ils ont été plus nombreux à jugés qu’une personne qui disait la vérité mentait.
Ce groupe a formé le préjugé que le mensonge était un phénomène omniprésent chez les personnes qui témoignaient. « Par conséquent, Lie to Me favorise le scepticisme au détriment de la précision », concluent les chercheurs.
Le biais de confirmation s’explique de deux façons. La première, positive, est la même que pour tous les autres biais : comme nous avons une multitude d’informations à notre portée, le biais nous permet en effet de traiter plus vite et plus facilement l’information. La seconde, négative, est liée à l’idée que, comme nous n’aimons pas nous tromper, le fait de chercher une erreur est plus difficile à accepter.
Voici une expérience menée en 2009 par une Université des Pays Bas et relatée dans le New Scientist.
On montre la même vidéo sur une même télévision à deux groupes disctinctes. Au premier groupe, on affiche de façon claire et nette qu’il s’agit d’un poste permettant de voir des images en HD. Au second groupe, on ne dit rien. Le questionnaire révèle que les personnes du premier groupe ont pratiquement toutes vu des images de meilleure qualité. En fait, sans comparaison des deux systèmes, nous sommes incapables de distinguer correctement les signaux numériques et haute définition. Mais, comme la croyance est que le système HD offre de meilleures images, nous nous persuadons en regardant une video en HD, que nous voyons de meilleures images.
Comprendre que le biais de confirmation, comme tous les autres biais, est une partie de notre constitution psychologique est une étape nécessaire si nous voulons avoir la chance d’y remédier, tout comme la reconnaissance que nous avons des préjugés est nécessaire pour les surmonter.
Lorsque nous nous rendrons compte que nous avons une tendance inconsciente à soupeser la preuve de manière sélective, nous aurons une meilleure chance de reconnaître notre erreur. Car un moyen de contrer ce biais est bien de chercher l’erreur, à chercher l’information qui contredit ce que nous pensons.
Autrement dit, la stratégie consiste à accepter l’idée que les erreurs sont inévitables, à se préparer à en faire et à apprendre d’elles. Il faut alors être ouvert à la possibilité de se tromper sur des idées tout à fait fondamentales. Il faut accepter l’idée que l’on a tort parce que le tort ne tue pas, mais au contraire permet d’apprendre et de progresser.
Ce biais est à l’origine d’autres biais et effets sur lesquels je reviendrai dans de prochains articles, car tous ont une influence certaine sur notre prise de décision quand nous devons faire un choix.
Je fais une illustration, à partir de situations concrètes, du biais de confirmation, du biais de représentativité et du biais de disponibilité.
Je propose une illustration des biais cognitifs, dans le domaine de la politique, dans le livre: « Est-ce que quelqu’un m’entend? », paru aux éditions Terre des Graves. Il s’agit d’un témoignage
rapporté de l’intérieur d’un parti politique au pouvoir. Pour en savoir plus: http://ericlafon.eu/post/est-ce-que-quelqu-un-m-entend
Oh ! Très intéressant. Je vais effectivement appronfondir votre lien. Merci !
C’est pourquoi c’est important de partager son expérience avec les autres et d’être capable d’écouter leurs opinions
Oui, tu as raison … encore faut il apprendre à poser les bonnes questions. Mais c’est une autre histoire