Les habitudes
La plupart du temps, nous enchainons nos habitudes dans notre vie quotidienne lorsque la journée ressemble à n’importe quelle autre journée. Cela permet à notre cerveau de pouvoir être en alerte sur ce qui n’est pas habituel.
Les jours ordinaires sont ainsi parsemés de multiples enchainements d’actions que les psychologues appellent des scénarios. Par exemple, pensez à la façon dont vous vous préparez avant de sortir de votre logement le matin pour aller travailler. Vous enchainez des actions les unes à la suite des autres, pratiquement toujours les mêmes et dans le même ordre. Ou encore, plus parlant, la façon dont vous démarrez votre voiture. Vous mettez la clé pour établir le contact et ensuite vous manoeuvrez sans réfléchir aux gestes que vous faites sur le levier de vitesse ou les pédales.
Ce sont des scénarios qui sont ancrés dans votre cerveau comme une suite de gestes à faire et dont vous n’avez plus vraiment conscience séparement.
Ces scénarios sont très utiles puisqu’ils nous permettent d’avoir de l’espace pour recevoir d’autres informations. Mais il peut arriver que certaines de ces habitudes scénarisées soient devenues inefficaces, inutiles, inadéquates voire nuisibles à notre mode de vie ou de pensée. Il peut aussi arriver que votre partenaire ou un proche vous demande de modifier une habitude.
Cela peut être une action très simple, comme réussir à ne pas se lever d’une chaise sans la trainer sur le sol ou une action qui nous nuit vraiment, comme ouvrir le réfrigérateur pour piocher quelque chose à manger en dehors des repas ou allumer la télé en rentrant chez soi. Cela peut être des tas d’habitudes qui ont un jour répondu à des pensées utiles, nécessaires et intéressants et qui ne le sont plus aujourd’hui parce qu’elles entravent le reste de notre vie.
Bref, je veux parler de toutes ces habitudes que nous avons et qui, un jour, nous gênent pour une raison ou pour une autre. Une de ces habitudes dont on se dit ; « il faudrait que je change ».
Mais ce n’est pas si simple que ça. Il ne suffit pas de se dire : bon je vais supprimer cette habitude parce que je sens qu’elle m’énerve, m’empêche de faire le reste … etc..
Je vais prendre un exemple personnel. Il y a quelque temps, je me suis dit qu’il fallait que je me lave les dents après le déjeuner au lieu de le faire avant le petit déjeuner.
J’ai pensé que ce n’était effectivement pas très malin de se laver les dents au réveil puisque je me les lavais au coucher. C’est une opinion personnelle et certains pourraient arguer du contraire, sans que cela me vexe. Chacun a sa propre opinion à ce sujet.
Bref, je voulais juste modifier mon habitude, supprimer un geste automatique superflu et rajouter un geste automatique utile après le repas de midi. Pas de difficulté particulière puisque je travaille chez moi. Mais pas facile à rendre automatique, donc à systématiquement y penser, à faire d’un geste une habitude ancrée. Et cet exemple va me servir pour vous expliquer comment faire pour modifier n’importe quelle habitude ancrée dans notre vie quotidienne dont nous voulons nous débarrasser.
Cette méthode peut s’étendre à toutes nos pensées, nos sentiments, nos émotions qui nous encombrent et qui sont attachées à des situations particulières. Bref, tout ce qui est automatisé dans notre cerveau.
Mais avant d’en venir au changement proprement dit, je vais rappeler l’essentiel sur la formation d’un scénario (enchainement de comportements automatiques)
Le comportement ancré en habitude
Un scénario est enclenché par un rappel suivi d’une routine puis d’une récompense.
Par exemple :
Le téléphone sonne. Pour votre cerveau, c’est le rappel d’un comportement : celui de répondre. Dès que la sonnerie sonne, la suite des comportements s’enchaine.
Vous répondez, c’est la routine. Le comportement attendu par votre cerveau qui le lance pratiquement en automatique. Pensez à la contrainte que vous vous imposez quand cette sonnerie intervient à un moment inopportun.
Vous identifiez votre correspond. C’est la récompense à l’action, l’avantage tiré du comportement qui a été enclenché automatiquement;
Plus la récompense est utile, plus le rappel sera efficace.
Le problème est que parfois, la récompense ne correspond plus à ce que le veut sans que le rappel soit supprimé. Autrement dit, on continue à enchainer les gestes alors que nous ne voulons plus les avoir.
On continue à ouvrir le réfrigérateur sans avoir faim, on continue à allumer la télé sans avoir quelque chose à regarder, on continue à glisser sa chaise dès qu’on se lève sans la soulever, on continue se brosser les dents au lever sans se souvenir qu’on préfère le faire à midi.
Comment modifier une habitude
La première règle est une règle d’or : bienveillance !
Plus vous allez rouspéter contre vous-même, plus votre cerveau va conserver l’habitude. Car, en maugréant, vous indiquez à votre cerveau que c’est important. Mais, comme il n’existe ni bien ni mal pour lui, ce qui est important est maintenu.
Donc la règle est de dire, si le scénario ancien persiste : tant pis, j’y arriverai la prochaine fois.
C’est la règle d’or, mais ce n’est pas la première pensée à avoir
1. Prendre conscience de l’enchainement des actions
Voilà la première pensée à avoir : prendre conscience que l’on fait ce que l’on veut supprimer. Ce n’est pas si simple que cela en a l’air. Il faut s’observer au moment où on débute le scénario et donc prendre conscience de ce que l’on fait et de la suite des gestes que ce que l’on a fait au début entraine.
Je suis dans la salle de bains et après m’être lavée et coiffée, je prends ma brosse à dents. Autrement dit, je constate qu’après m’être brossé les cheveux, j’enchaine par la prise de la brosse à dents.
Je prends également conscience qu’après le déjeuner, je fais la vaisselle et j’enchaine par la lecture de mes courriels.
2. Définir ce que l’on veut supprimer et mettre en place
Une fois que j’ai observé l’enchainement des comportements, le moment où je veux supprimer un geste et le moment où je vais en remettre un, il faut que je prenne conscience de ces moments. Il faut que la routine soit en pleine conscience.
C’est le plus difficile parce qu’il faut prendre conscience de l’enchainement des comportements et définir quand, quoi, comment et pourquoi.
Pour mon exemple : c’est après m’être coiffée que je vais m’imposer un geste qui supprimera mon brossage. C’est à dire, dans mon cas, choisir de mettre mes boucles d’oreilles après le brossage des cheveux. Et chaque fois que je me brosse les cheveux, j’en prends vraiment conscience pour enchainer avec ce que je veux faire ensuite.
Je prends conscience de ce je veux faire à la place du comportement que je veux supprimer. Et chaque fois que j’y arrive (dans cet exemple, c’est facile, j’en conviens), je me félicite.
Autrement dit, je me félicite de refermer la porte du réfrigérateur, je me félicite de ne pas allumer la télé en rentrant.
Dans le même temps, j’essaie de définir le comportement désiré et de l’intercaler dans une série d’actions.
Je décide qu’après avoir fait la vaisselle du déjeuner, je me lave les dents. Donc en prenant conscience que je suis en train de faire la vaisselle, je prends conscience de ma volonté d’enchainer par le brossage de dents.
On peut aussi, par exemple, penser à mettre la main sur la table avant de se lever pour penser à ne pas tirer sa chaise mais la soulever.
On peut décider d’ouvrir un livre quand on a envie d’ouvrir le réfrigérateur.
On peut décider de s’allonger sur le canapé en rentrant sans n’avoir quoique ce soit à faire, juste pour apprécier le temps qui passe.
C’est vraiment une histoire personnelle à laquelle on doit réfléchir et qui nous appartient en propre. Mais cette étape est importante. Il faut y penser avant, savoir ce que l’on veut faire, quand on veut le faire, comment on veut le faire et pourquoi.
3. Mettre en place le comportement
Ce comportement à mettre en place doit être défini par une récompense. Une satisfaction.
Cela peut être la simple satisfaction d’avoir réussi à introduire un comportement désiré dans une chaine d’actions. Cela peut être aussi la satisfaction des autres, de l’autre qui nous reprochait un comportement qui l’énervait.
Il faut prendre conscience de ce que ce nouveau comportement nous apporte et toujours suivre la règle d’or si l’on rate ou si l’on oublie : pas grave, j’y arriverai demain.
Dans mon exemple, j’ai insisté sur la sensation de bien être de ma laver les dents après le déjeuner.
Mais vous pouvez aussi avoir le plaisir de ne plus entendre votre compagnon râler parce que vous avez fait glisser la chaine au lieu de la soulever. Vous pouvez avoir le plaisir de n’avoir pas grignoté inutilement et de constater que votre poids stagne ou même diminue. Vous pouvez avoir le plaisir de prendre l’habitude de discuter avec votre partenaire sans télé allumée au retour du travail.
Il est nécessaire que ce plaisir, cette satisfaction soit pleinement consciente. La prise de conscience est le maître mot de ce changement d’habitude.
4. Le scénario final
Comme lorsqu’on a appris à enchainer les actions sur le levier de vitesse et sur les pédales, l’apprentissage d’un nouveau scénario est lent.
Il faut juste ne pas se décourager et bien continer à s’observer, autrement dit, à mettre en conscience ce que l’on fait.
On dit généralement qu’il faut 28 jours consécutifs pour ancrer une habitude. C’est long, mais tout est faisable, avec patience et bienveillance.
Bien sûr, ici, je ne parle pas de comportement addictif mais de simple comportement ancré comme habitude et dont on veut se débarrasser. La suppression d’un comportement addictif pose le problème du pourquoi avant de définir ce que l’on veut modifier.