Comme il m’arrive souvent de recevoir des courriels demandant des précisions sur le type de thérapies que je mets en oeuvre auprès de mes patients, c’est à dire sur les Thérapies comportementales et cognitives, j’ai décidé d’écrire cet article pour en résumer les grands aspects.
Que sont les TCC ?
A) Les TCC sont des thérapies qui ont un large champ théorique.
– la psychologie expérimentale étudie scientifiquement les comportements directement observables
– les théories de l’apprentissage (behaviorisme, congitivisme, constructivisme, humanisme et connectivisme) étudient comment se fait l’apprentissage, quels sont les facteurs d’influence, quel est le rôle de la mémoire, comment se fait le transfert des connaissances. Il y a deux lois à la base de ces théories :
1. la loi de l’effet : un comportement suivi d’une récompense (d’une satisfaction) sera associé à la situation qui l’a déclenché. L’homme a besoin d’un lien de cause à effet.
2. la loi de l’exercice : plus un sujet se comporte d’une certaine façon dans une situation donnée, plus l’association entre cette situation et ce comportement sera renforcée.
– les sciences cognitives décrivent, expliquent et même simulent les mécanismes de la pensée (humaine, animale et artificielle). Elles étudient donc la perception, l’intelligence, le langage, le calcul, le raisonnement et la conscience.
B) Les TCC ont des techniques spécifiques qui définissent les stratégies thérapeutiques et le style relationnel.
Les séances en TCC
Les séances sont dynamiques. Le patient et le thérapeute ont chacun leur rôle et la thérapie obéit à une méthodologie définie.
Le patient est l’expert de sa problématique. Il joue donc un rôle actif pendant la thérapie en déterminant ses objectifs de changement et les solutions qu’il peut apporter. Entre les séances, le patient s’exerce afin de pouvoir faire des ajustements à la séance suivante.
Le thérapeute est l’expert des techniques. C’est pour cela qu’il fournit des informations (et non des conseils). La méthode utilisée dans les séances est apparentée à celle que l’on appelle « coaching » puisque le thérapeute instaure un dialogue socratique. Le but étant alors de mettre en avant les contradictions pour mener le patient aux pensées inconscientes. Le thérapeute renforce les situations positives et encourage le moindre pas.
La thérapie est basée sur des paramètres comportementaux, cognitifs, émotionnels et envrironnementaux. Même si on se situe dans l’ici et le maintenant, le patient inscrit sa souffrance dans son histoire. Chaque séance se termine par de tâches à effectuer qui doivent être des expériences de changement pour le patient.
L’alliance thérapeutique est une colloboration interactive entre le patient et le thérapeute.
Les différentes techniques en TCC
1. L’exposition
Le fondement théorique de cette technique est celui des théories de l’apprentissage et en particulier du concept de l’acquisition et du concept de l’habituation. Le principe de cette technique, issue des travaux de la psychologie expérimentale, est de se confronter, selon certaines règles, aux stimuli anxiogènes pour diminuer la réponse anxieuse associée. Il s’agit d’utiliser un mécanisme d’habituation qui se fait progressivement et de manière répétée.
Je n’utilise jamais de technique in vivo, mais, dans le cas de certains troubles particuliers, j’utilise une exposition en imagination.
2. La restructuration cognitive
Il s’agit de travailler sur le traitement sélectif de l’information. Il s’agit de restructurer et de corriger les pensées dysfonctionnelles. On s’intéresse à l’identification puis la modification des trois variables cognitives (les pensées, les distorsions, les schémas).
En utilisant cette technique, le patient prend conscience de son discours intérieur et de la réaction circulaire entre la situation, les émotions, les pensées, les croyances et le comportement.
En face d’une situation, nous sommes surtout conscients de la situation et notre comportement et inconscient de nos pensées et des émotions que celles ci provoquent. Il est nécessaire alors de prendre conscience de nos cognitions et de nos émotions qui s’intercalent entre la situation et le comportement. Une fois cette prise de conscience établie, une fois que l’on comprend nos biais de pensées, de nos jugements arbitraires, nous pouvons diminuer la souffrance émotionnelle pour agir sur nos comportements et les décider en toute conscience.
Imaginons quelqu’un qui systématiquement fait échhouer toutes ses tentatives de séduction. Cette personne ne parvient pas à se comporter de manière rassurante vis à vis de la personne qui lui plait et fait fuir l’autre. En découvrant qu’avant même d’aborder la personne qui lui plait, il pense « je suis nul, inintéressant », il découvre du même coup son émotion de tristesse attachée à toute situation de séduction. En restructurant ce schéma cognitif inadapté, il modifie son jugement sur lui, modifie l’émotion qui en découle et modifie son comportement en l’adaptant au résultat recherché et non plus au jugement négatif sur lui.
3. L’affirmation de soi
Dans de nombreux cas de malaises, les comportements relationnels sont perturbés. Le travail sur l’affirmation de soi permet de réduire les comportements passifs ou agressifs liés à des émotions négatives comme la peur ou la tristesse.
Généralement, les TCC travaillent alors sur des situations précises et mettent en place des jeu de rôle pour permettre à la personne d’entrer en contact avec des inconnus, de pouvoir dire non quand on le pense, d’apprendre à donner ou à recevoir, de répondre aux critiques et aux compliments… de mener efficacement une conversation.
4. Les relaxations comportementales
Il y a plusieurs catégories de relaxations.
a) La relaxation comportementale
Très utilisée dans les états de stress ou d’anxiété, la relaxation permet d’agir sur la réponse physiologique en diminuant l’activité du système sympathique.
A côté de la relaxation simple qui agit sur la détente des muscles et sur le contrôle de la respiration, il y a deux grandes autres techniques plus complexes :
– le training autogene, du docteur Schultz : Composée de deux cycles, la méthode permet de parvenir à la détente et d’accéder à une déconnexion générale de tout l’organisme.
– la relaxation musculaire progressive du docteur Edmund Jacobson : cette méthode permet d’obtenir le calme au niveau psychique.
b) la relaxation par modification des états de conscience
Il faut distinguer les niveaux de vigilance et les états de conscience. Les niveaux de vigilance sont observables et mesurables. La conscience relève de l’expérience subjective des états.
Par la relaxation, il y a modification volontaire de la conscience vigile.
Modifier ses états de conscience permet en psychothérapie de mieux gérer ses réactions émotionnelles. Plusieurs techniques permettent de modifier ses états de conscience. Parmi les techniques vérifiées scientifiquement, on trouve essentiellement :
– l’isolement sensorielle c’est à dire le retrait des sens, la coupure du monde extérieur ou l’intériorisation. Cela permet d’atteindre les états dits supérieurs de la conscience.
– l’immobilité et la relaxation
– la répétition verbale ou mantra
Cette technique a effet puissant sur le processus de production d’idées obsessives.
– le mandala
C’est un dessin centré qui se déploie autour d’un cercle. Expérimentée et recommandée par Jung, la technique permet la reconstruction de la personnalité.
– la visualisation d’images mentales
Cette technique remporte un très vif succès aux USA. On l’appelle aussi : pensée positive, imagination active, programmation mentale.
Les résultats des TCC
Les TCC sont utilisées pour de nombreux troubles. Pour un même trouble, on peut utiliser une ou plusieurs techniques décrites plus haut ou parfois même, les associer à d’autres approches psychothérapiques ( EMDR) ou médicamenteuses.
Exemple :
Dépression ; utilisation de la thérapie cognitive.
TOC : technique d’exposition et restructuration cognitive
Phobies ; utilisation de la relaxation, technique d’exposition et restructuration cognitive
Trouble anxieux : technique d’exposition, restructuration cognitive.
Dans de nombreux cas évalués à moyen et long terme, les TCC ont prouvé leur efficacité. Elles ont été largement étudiées dans les troubles anxieux, le stress post traumatique et les phobies.